Port-Cros : une Charte du parc national pour 2015 Abonnés
La Charte devrait être adoptée par le conseil d’administration d’ici le 31 décembre. En vertu de la loi du 14 avril 2006, le décret d’approbation de la Charte, prévu pour 2015, ouvrira alors la période de 4 mois durant laquelle les 11 communes de l’aire potentielle seront appelées à se prononcer sur leur adhésion à la Charte.
Mi-mai, une réunion commune des membres du conseil d’administration et du CESC intervenait sous forme d’un parcours maritime et terrestre réunissant 77 participants : suivi de l’aire d’adhésion au long du littoral, traversée de l’aire marine protégée et visite du cœur de parc à Port-Cros.
2015-2030 : un projet de territoire sur 6 axes terre-mer
L’élaboration de la Charte s’effectue au sein de 6 ateliers réunissant des membres du CESC et des experts qualifiés, qui sont animés par des élus et des représentants du PN. La réflexion porte sur : le patrimoine ; la biodiversité ; le développement économique sur terre et sur mer ; l’aménagement et la mobilité ; la recherche et l’éducation à l’environnement ; la gestion intégrée terre-mer.
Le travail en ateliers a fait émerger 500 propositions, qu’il reste à hiérarchiser : les ambitions exprimées seront traduites en orientations puis en mesures, l’objectif étant d’obtenir un consensus pour élever les exigences environnementales et définir une capacité de charge optimale sur terre et en mer.
La notion clef de « capacité de charge optimale » résulte d’analyses quantitatives et qualitatives, notamment l’étude Bountiles (base d’observation des usages nautiques et terrestres des îles). Cette méthode de suivi de la fréquentation des îles s’appuie sur le diagnostic de répartition des flux et sur l’analyse des attentes pour déterminer la capacité de charge en termes d’infrastructures, d’impact biologique et écologique, d’équipements touristiques (plages, terrasses) et publics (assainissement, déchets) : l’objectif est de déterminer un seuil maximal de fréquentation, à définir avec les élus et les transporteurs maritimes.
Les propositions pour la Charte se basent sur le développement d’un mode de gestion différent selon les îles pour jouer sur leur complémentarité ; sur Porquerolles et Port-Cros s’applique déjà un gradient de naturalité, qui consiste à réduire la visibilité des aménagements à mesure qu’on s’éloigne des points d’entrée aux sites. Pour équilibrer l’aménagement de l’espace, les professionnels de la plongée (60 000 plongeurs/an) suggèrent un transfert d’une partie des activités de Port-Cros vers Porquerolles. Les hébergeurs, loueurs de bateaux et commerçants sont favorables au projet, y compris ceux des 4 communes encore opposées à l’adhésion (Le Lavandou, Bormes-les-Mimosas, La Londe Les Maures et Carqueiranne). Mais ils dénoncent la saturation de l’espace et des équipements (multiplication des vélos, capacité limitée de la station d’épuration, approvisionnement en eau potable, défaut de collecte et de recyclage des graisses de restauration…). D’où l’idée d’utiliser les hébergements disponibles sur l’île du Levant pour les randonneurs de Port-Cros (450 000 visiteurs/an).
Des élus plutôt favorables
Parmi les élus participant à la visite, Jacques Politi, président du PN Port-Cros et maire d’Hyères-les-Palmiers, porte l’adhésion de sa commune, siège du parc et ville centre de l’aire d’adhésion avec ses 60 000 habitants. Sur ce territoire très touristique, l’élu voit le label PN Port-Cros comme un atout économique pour la viticulture, le maraîchage et la pêche artisanale. L’importance du secteur de la Défense sur le Levant et Hyères et la présence de l’aéroport Toulon-Hyères dans l’aire d’adhésion écartent toute sanctuarisation. Mais l’engagement dans la Charte permettra de mieux gérer la saisonnalité et de mutualiser les moyens d’action des collectivités et du PN dans l’aire d’adhésion en matière de tourisme et de transports : l’élu se dit convaincu que les communes en attente suivront.
Pour Gilbert Carra, adjoint à l’environnement de Ramatuelle, l’enjeu de la Charte repose sur la maîtrise de la fréquentation et de l’accueil. En tant qu’animateur de l’atelier Biodiversité du CESC, il prône l’emploi d’espèces économes en eau, alors que certains arrachent des chênes verts pour planter palmiers et gazon. L’élu souligne la pertinence de l’aire d’adhésion sur la commune de Ramatuelle : le périmètre s’arrête à la ligne de crête, dans l’axe du cap Camarat, à la limite de co-visibilité entre le littoral et les Îles d’or. Il prône l’instauration d’une zone de cantonnement pour favoriser la biodiversité et la pêche (voir EL n° 995). Conscient que la Charte représente pour le PN un moyen de diluer la fréquentation vers l’aire d’adhésion, il est persuadé de son intérêt pour sa commune ; il lui reste à en convaincre le conseil municipal et le public.
Christine Sandel, conseiller régional, siège depuis 2004 au conseil d’administration du PN. Elle en est vice-présidente, ce qui a contribué à renforcer l’implication pour le PN de la région PACA, naturellement tournée vers ses parcs naturels régionaux.
Au-delà de l’enjeu prioritaire de sécurité des personnes et des biens, la gestion des sites militaires intègre désormais les enjeux environnementaux (voir EL n° 979 et 993) : l’intégration de l’île du Levant dans l’aire d’adhésion est un symbole fort pour la Direction générale de l’armement (DGA), qui en occupe l’essentiel, le reste relevant du site naturiste d’Héliopolis. La base DGA Essais missiles du Levant (200 personnes) sert à l’exécution des essais en milieu sous-marin et aux activités de simulation de guerre électronique. La proximité du PN et l’appartenance au sanctuaire Pelagos de protection des mammifères marins ont conduit l’armée à maîtriser ses activités dans le respect de l’écosystème. Ainsi, lors des essais en mer, toute détection de présence d’un cétacé entraîne la suspension des tirs, souligne Patrick Zoppi, chargé de communication. Deux personnels militaires, correspondants naturalistes du PN, consacrent 30 % de leur activité à l’environnement et le chef de site siège au CESC.
Les risques environnementaux liés à l’accueil du public
Le feu est le premier des risques. Sur Port-Cros, le dernier incendie sévère, causé par le tir d’une fusée de détresse depuis un bateau, remonte à 1980. Le risque explosif d’incendie (risque noir), qui conjugue un vent violent, une faible hygrométrie et une forte sécheresse de la végétation et du sol, advient en moyenne 4 jours/an. Le risque orange concerne 15 jours/an (30 en 2003). En cas de risque majeur d’incendie, le préfet prend un arrêté de fermeture des massifs (500 ha, 30 km de sentiers), mais le PN, qui dispose de 3 agents pour 2 000 touristes, souhaiterait pouvoir alors limiter l’accès des visiteurs.
Autre risque environnemental, les déchets : le rejet de « la main tendue aux déchets » a vu la suppression des poubelles au profit de quelques conteneurs. Les rares plages sont équipées de toilettes sèches. Mais, en saison, les agents ramassent 800 papiers hygiéniques par semaine sur l’île…
Des ganivelles (piquets de bois) sont posées pour protéger les végétaux sensibles au piétinement. D’autres, comme le myrte, subissent la pollution par les embruns chargés de détergents qui attaquent la cuticule de protection des feuilles. La forte pluviométrie de 2013 permet d’observer des espèces invisibles depuis des années, mais les espèces invasives prolifèrent en mer (algue caulerpa taxifolia) et sur les falaises (griffes de sorcière araujia sericifera), où les agents du PN effectuent le dégriffage.
La faune compte nombre d’espèces protégées (oiseau marin puffin, lézard gecko, batracien discoglosse), menacées par des prédateurs, rat noir et espèces dites de Lesseps (barracuda, poisson-lapin), remontées de Méditerranée orientale en raison du changement climatique.
Les agents du PN habilités à verbaliser au titre de la police de l’environnement privilégient le rappel à la réglementation sur la sanction. En 2012, 23 procès-verbaux avec procédure (contravention de 5ème classe et délit) sont intervenus, soit 2 pour mouillage interdit, 4 pour pêche, 13 excès de vitesse sur mer et 4 pour plongée hors charte et nourrissage de poissons ; 15 timbres amendes (contraventions de 1ère à 4ème classe) ont été délivrés concernant 10 cigarettes, 1 jet ski, 2 nuisances sonores, 1 chien et 1 petite pêche. Au total, 38 verbalisations ont eu lieu en 2012, soit 5 % des 700 infractions constatées.
Anne Lévy-Thibert
non signé le 13 juin 2013 - n°996 de La Lettre de l'Environnement Local
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