Seine Morée, site d’excellence du SIAAP pour l’assainissement francilien Abonnés
La dernière née du SIAAP a coûté 130 millions d’€, dont 45 % de financement de l’Agence de l’eau Seine-Normandie, 35 % du SIAAP et 20 % de la Région Île-de-France.
Une step fonctionnant en autonomie
Cette usine intelligente cumule les performances, détaille Frédéric Darsaut, conducteur d’opération « La Morée » au SIAAP : traitement des nuisances sonores, olfactives et visuelles, production d’énergie, d’eau industrielle, de compost ; insertion dans la trame verte et bleue par un bâtiment à socle minéral avec toiture et parois végétalisées. Mise en service progressivement dès janvier 2014 pour un an de réglages, la step traite jusqu’à 75 000 m³ de débit par temps de pluie, dont 52 000 m³d’eaux usées, et rejette une eau traitée de qualité eau de baignade à l’issue du traitement sur bioréacteurs à membranes. Une partie de l’eau traitée par UV et chloration est utilisée sur place en eau industrielle pour l’arrosage des espaces verts de la step et la fourniture d’arrosage à la commune, notamment pour le cimetière voisin.
Au plan énergétique, la récupération de chaleur est la règle : pompes à chaleur réversibles et échangeurs convertissent la chaleur dégagée par les moteurs et les calories issues des rejets d’eaux épurées et de l’air lié au traitement, pour chauffer et rafraîchir les locaux techniques et administratifs ; une chaudière d’appoint à gaz complète en cas de température extérieure négative.
Valorisation des boues de step
Le traitement des eaux usées génère des boues primaires de décantation et des boues biologiques d’épuration ; après sédimentation ou centrifugation, elles sortent de l’usine sous forme liquide à 70 g de matière sèche/litre. Pour le moment, ces boues déshydratées et chaulées seront livrées par camion à une plateforme de compostage.
D’ici 2017, elles seront directement pompées à l’état liquide vers l’usine de méthanisation en construction à 400 m de la step, qui effectuera sur une plateforme unique les opérations de digestion, méthanisation et compostage des boues de step mélangées à des biodéchets. Ce projet de 85 M€, en co-maîtrise d’ouvrage du SIAAP et du SYCTOM, l’agence métropolitaine des déchets ménagers, valorisera par digestion biologique en mélange les 10 000 tonnes de matière sèche de boues de step produites annuellement et les 15 000 tonnes de biodéchets issus des collectes sélectives du SYCTOM. Le biogaz de méthanisation sera valorisé en cogénération (production évaluée à 21 000 Mwh/an) ; une étude est en cours avec GRdF pour la réinjection du biogaz dans le réseau quand le décret adéquat sera sorti. La co-digestion des boues et biodéchets produira également 17 000 T/an de compost à la norme NFU 44-095 utilisable en amendement agricole.
http://projet.siaap.syctom.fr
Un exemple d’intégration urbaine et d’écologie industrielle
Les travaux ont commencé fin 2010 ; pour transporter les effluents, le SIAAP a construit en 2011 un ouvrage de 1 600 m de long et 1,6 m de diamètre depuis Aulnay-sous-Bois jusqu’à l’usine Seine Morée (coût 16 M€). Sur une parcelle de 2,5 ha seulement, Seine Morée traite les eaux des communes d’Aulnay, Sevran, Tremblay, Vaujours, Villepinte et une partie du Blanc-Mesnil et de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, soit une capacité de 300 000 équivalents habitants (dont 200 000 équivalents habitants urbains, plus des eaux industrielles venues de sites liés au SIAAP par des conventions de prétraitement).
Le SIAAP, maître d’ouvrage, s’est appuyé pour la conception de Seine Morée sur le bureau d’études et d’ingénierie Naldeo, la construction de l’usine reposant sur un groupement Degrémont pour la filière de traitement, Vinci Construction Grands Projets pour le génie civil et Architectes Associés pour l’Environnement (AA’E). La filière de traitement par bioréacteur est similaire à celle d’Aquaviva (voir EL n° 1007), sans le séchage thermique des boues. La conception de l’usine associe compacité, confinement, efficience et ergonomie :
- compacité, car ce terrain pentu est enclavé dans une zone urbaine qui réunit des pavillons, des bâtiments de bureaux et le parc d’activités Garonor. De l’extérieur, la step revêt une forme contemporaine, alternant des étages de gabions grillagés anti-tags et des bandes végétales ; les installations invisibles s’organisent sur deux plateformes, autour d’une rue technologique intérieure très fonctionnelle ;
- confinement, pour éviter toute nuisance, d’où une usine sur deux niveaux, avec des bassins enterrés pour respecter la hauteur de construction à 15 m du PLU ; les 3 lignes de désodorisation traitent 200 000 m³/heure par acide sulfurique, javel et soude, pour descendre à 6 unités d’odeur en sortie ; l’eau des tours de lavage d’air repart ensuite pour traitement en tête de step ;
- efficience, grâce au traitement biologique qui minimise les apports de réactifs : la déphosphatation s’effectue sans réactif, à partir du carbone endogène, pour obtenir une teneur en phosphore résiduel limitée à 0,2 mg/l. Les performances attendues ciblent l’élimination de 99 % des matières en suspension, 95 % des pollutions carbonées, 97 % des pollutions phosphorés et 70 % des pollutions azotées. De ce fait, le m³ d’eau traité, évalué selon la charge de DCO (demande complémentaire en oxygène) abattue, est le plus cher du SIAAP…
- ergonomie, car les concepteurs ont travaillé à mécaniser et rationaliser les manipulations et les déplacements sur les équipements : la manutention des modules de membranes des bioréacteurs s’effectue par pont roulant, et les installations sont visitables par trou d’homme.
Un traitement différé des eaux pluviales
L’usine, associée au bassin versant de la Morée, traite 1,2 m³/seconde par temps sec et 1,9 m³/s par temps de pluie. La Morée, ruisseau de 12 km canalisé et couvert, débouche d’une buse en amont de l’usine, au sortir des 3 bassins de rétention à ciel ouvert aménagés par la DEA 93 (direction de l’eau et de l’assainissement). Sous la step, un bassin tampon de 6 000 m³ sert à stocker l’eau des crues, en vue d’un traitement différé des eaux pluviales décantées : ce prétraitement est en effet dimensionné pour 1,9 m³/s, tandis que la capacité de traitement des bioréacteurs est de 1,2 m³/s.
La Morée, remise à ciel ouvert sur 135 m dans l’enceinte de la step, s’écoule entre des berges végétalisées jusqu’à un bassin paysagé, avant de rejoindre la Vieille Mer puis la Seine ; elle recevra des eaux dépolluées de Seine Morée, dont la qualité biologique et chimique permettra de redonner vie au cours d’eau.
Anne Lévy-Thibert
non signé le 06 février 2014 - n°1010 de La Lettre de l'Environnement Local des communes et des intercommunalités
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